Cela fait un bout de temps que ce blog est resté silencieux ; un peu moins de choses à dire, d'autres préoccupations, mais, souvent, les pensées murissent en silence, de façon souterraine, ne nourrissant de balades, de rencontres, de tâtonnements. C'est en s'imprégnant d'un territoire qu'on finit par le comprendre.
Notre intégration dans le Cantal se poursuit, s'approfondit : Quand je croise de plus en plus de tête connues au marché ou au cinéma à Mauriac, je commence à me dire que je suis chez moi ici.
Un hiver particulièrement atypique, des évènements particuliers comme ce glissement de terrain qui a coupé la route pendant près d'un mois et dont les séquelles ne sont pas totalement guéries, une meilleure compréhension de l'histoire de ce territoire, les échanges au sein de l'association ASPECT et avec d'autres habitants, ont rendu plus évident pour moi une des caractéristiques de la Vallée du Mars : son insularité et par la même me donne envie d'interroger la notion de frontière.
l'insularité
Peu importe que la vallée du Mars se prolonge jusqu'à son confluent avec la Sumène à Vendes. La basse vallée du Mars n'est qu'un interminable no man's land. Sur une douzaine de km, quasiment pas de trace d'occupation humaine, la pisciculture de Romanange et ses chèvres bien souvent au milieu de la route, un maison à Escroc et c'est tout. Une petite route qui suit le cours du Mars se frayant son chemin dans une vallée en V, une route étroite qui nous rammène un siècle en arrière et qui ne donne pas envie de croiser un véhicule arrivant en sens inverse. Il arrive d'être obligé d'éviter des pierres parfois au milieu de la route ou de rouler sur un peu de mousse à certains endroits. Pour le visiteur arrivant de Clermont ou d'ailleurs quittant les routes principales, c'est un dépaysement total et en même temps cela présente un charme fou.
Puis tout à coup, nous voila à Pons, le regard porte plus loin, les perspectives se sont élargies, nous sommes entrée dans la "Vallée du Mars" celle belle vallée en auge creusée par la glacier. Pons est un port par lequel nous pouvons accoster la vallée heureuse.
La géographie ou plutôt la géomorphologie et l'histoire font que les trois communes actuelles qui occupent une grande partie de la vallée du Mars Saint-Vincent, Le Vaulmier, Le Falgoux constituent une une entitée ancienne C'est la Baronnie des Valmiers dont l'origine se perd dans les limbes du haut moyen-age.
Cette structure ancienne perdra de sa pertinence et au cours des périodes historiques récentes et c'est Falgoux qui assurera la leadership (j'en veux pour preuve les cartes du début du 20ème siècle qui indique Vallée du Falgoux au lieu de Vallée du Mars).
L'exode rural et le vieillissement démographique mettront à mal cette situation et la position du Falgoux ( station de vacances abritant une petite station de ski, des colonies de vacances et une population nombreuse) perdra un peu de sa superbe.
la frontière
le Mars coule vers le nord-ouest. Dans la partie supérieure, la vallée est une large vallée en U forgée par les glaciers limitée par de petites falaises abruptes faites d'orgues basaltiques. il est frappant de constater que la limite au sud-ouest est une frontière naturelle et humaine très ancienne qui est encore présente dans les têtes. Au moyen-age c'était le sommet du versant à l'ubac était la frontière entre les territoires des Contours d'Apchon qui possédaient la baronnies des Valmiers et ceux contrôlés par les barons de Salers et la famille d'Escoraille.
La quasi totalité des estives des gens de la vallée sont encore côté Trizac, ce qui à eu pour conséquence de conserver les chemins qui permettent d'y accéder. Sur le plateau d'Anglards les voies de communication entre le fond de la vallée et le plateau ont disparues. Au moyen-age il y avait des raisons de devoir se rendre à Salers (siège du baillage de la Haute-Auvergne) mais cette fonction avait disparu au XIXème et les circulations (piste des estives) se sont réorganisées à partir du bourg d'Anglards.
Anglards de Salers fait partie de la vallée du Mars puisqu'une partie de la commune occupe le fond de la vallée à l'aval de St-Vincent... mais pas dans les têtes des uns et des autre.
Bien sur, à notre époque, cela n'a plus guère de sens... mais quand même il ne me semble pas inintéressant de penser qu'inconsciemment, et la géomorphologie, et des structures sociales médiévales, peuvent encore expliquer un territoire. Cela pourrait aussi n'être qu'une explication imaginaire... mais